[biologie] Vision des couleurs chez Myrmica sabuleti, vision des couleurs et intensités lumineuses |
Bienvenue invité ( Connexion | Inscription )
[biologie] Vision des couleurs chez Myrmica sabuleti, vision des couleurs et intensités lumineuses |
Thursday 24 December 2009 à 13:59
Message
#1
|
|
Myrmécomorphe Groupe: Contributeurs Messages: 5 633 Inscrit: 20/08/2007 Lieu : Armentières (59) Membre No.: 1 645 |
La perception visuelle des couleurs par les ouvrières de la fourmi Myrmica sabuleti (M.-C. Cammaerts)
CITATION Résumé
Les ouvrières de Myrmica sabuleti distinguent deux appareillages expérimentaux de couleur différente. En forte lumière, leur discrimination est très significative. Leur sensibilité est faible au niveau du rouge et maximale au niveau du jaune et du bleu. En faible lumière, ces fourmis discriminent moins bien deux couleurs l’une de l’autre. Elles cessent alors d’être sensibles au rouge, et, pour les autres couleurs, leur sensibilité se décale vers des longueurs d’onde plus petites. Les ouvrières de Myrmica sabuleti distinguent très bien, en forte lumière, le rouge, le jaune, le vert, le bleu ainsi que le violet d’une palette de gris, discriminant alors surtout le jaune et le bleu. En faible lumière, leur distinction est en général moindre et maximale pour le vert et le violet. Les ouvrières de M. sabuleti pourraient donc avoir des seuils chromatiques différents pour différentes longueurs d’onde, une hypothèse en cours de vérification. En lumière ultraviolette, ces ouvrières distinguent un appareillage creux et noir présenté sur leur aire de récolte blanche. Leur perception visuelle, d’une part de la lumière visible, d’autre part de la lumière ultraviolette, leur confère peut-être une certaine vision de la perspective (cette perception de la perspective a été révélée lors d’une étude antérieure). Introduction Après avoir étudié diverses caractéristiques de la vision des ouvrières deMyrmica sabuleti, ainsi que la sensibilité de ces fourmis à la lumière, nous avons entrepris d’en étudier la perception visuelle des couleurs. La vision des couleurs a été amplement étudiée chez bien des Vertébrés et des Invertébrés (Odonates, Coléoptères, Lépidoptères, Hyménoptères) (Autrum, 1981) mais, jusqu’à ce jour, aucune fourmi pourvue de yeux relativement petits, comme le sont les M. sabuleti, n’a fait l’objet d’une telle étude. Union Internationale pour l'Etude des Insectes Sociaux, Colloque annuel de la section française - Université d'Avignon et des pays de Vaucluse, Avignon, 24-27 Avril 2006 Matériel et méthodes Dix sociétés de M. sabuleti furent récoltées en Ardenne Belge et subdivisées en trente sociétés expérimentales démographiquement similaires, et maintenues au laboratoire dans des bacs en polyéthylène, les fourmis nichant dans des tubes à moitié remplis d’eau. La discrimination par les fourmis entre deux couleurs fut analysée par le biais de conditionnements opérants différentiels portant sur deux appareillages pyramidaux chacun d’une couleur différente ( = premières expériences). La discrimination entre une couleur et une palette de gris fut étudiée sur base de conditionnements opérants différentiels utilisant des hexagones formés de six triangles équilatéraux chacun d’un gris différent et sur lequel hexagone un triangle équilatéral (de même dimensions) d’une couleur précise était posé ( = secondes expériences). La perception de la lumière ultraviolette par les ouvrières de M. sabuleti fut étudiée en conditionnant les fourmis (par simple conditionnement opérant) à des appareillages expérimentaux noirs et creux, sous lesquels elles devaient aller s’alimenter ( = troisièmes expériences). Leur locomotion à l’intérieur de cercles de 12 cm de diamètre centrés sur les appareillages furent ensuite analysée selon la méthode décrite dans Cammaerts-Tricot (1973). Résultats Discrimination entre deux couleurs différentes (premières expériences) (Tab. 1) En lumière intense, les ouvrières de M. sabuleti ont distingué l’une de l’autre les deux couleurs de chaque paire de couleurs présentée. Leur sensibilité s’est avérée être faible pour des longueurs d’onde correspondant à du rouge et maximale pour des longueurs d’onde correspondant à du jaune et à du bleu. En lumière peu intense, ces mêmes ouvrières n’ont plus distingué les couleurs rouges du noir, mais ont encore discriminé l’une de l’autre les couleurs de toutes les autres paires de couleurs présentées. Leurs plus grandes sensibilités se situaient cette fois au niveau de longueurs d’onde correspondant au jaune-vert et au bleu-violet. Leur sensibilité aux longueurs d’onde se décale donc vers des longueurs d’onde plus petites quand l’intensité de la lumière diminue. Avant d’affirmer que, dans cette expérience, les fourmis distinguent non pas des différences de contraste mais bien des différences de couleurs, il convient d’étudier leur discrimination entre chaque couleur d’une part et différents gris d’autre part, ce qui est effectué dans l’expérience suivante. Tableau 1. Discrimination, par les ouvrières de Myrmica sabuleti, entre deux couleurs La discrimination par les fourmis est quantifiée par la différence entre le pourcentage moyen de bonnes réponses obtenues après 6 et 9 jours de conditionnement à une couleur et le pourcentage initial existant avant conditionnement. Couleurs présentées Sous 10.000 lux Sous 600 lux En lumière intense, les ouvrières de M. sabuleti ont distingué le rouge scarlet, le jaune, le vert, le bleu ainsi que le violet d’une palette de six gris différents. Les couleurs les mieux distinguées furent le jaune et le bleu. En lumière peu intense, ces même fourmis n’ont que faiblement distingué le rouge scarlet des gris, mais ont relativement bien distingué les autres couleurs des gris présentés. Les couleurs les mieux distinguées furent cette fois le vert et le violet. Nous retrouvons donc le décalage des sensibilités des fourmis vers les plus petites longueurs d’onde, suite à une diminution de l’intensité lumineuse. Tableau 2. Discrimination, par les ouvrières de Myrmica sabuleti, entre une couleur et une palette de six gris. La discrimination par les fourmis est quantifiée par la différence entre le pourcentage moyen de réponses à la couleur et le pourcentage moyen de réponses aux gris remplacés par la couleur. Couleurs Sous 10.000 lux Sous 600 lux Perception de la lumière ultraviolette (Tab. 3) Les ouvrières de M. sabuleti conditionnées sous lumière ultraviolette à répondre à un appareillage noir et creux ont parfaitement répondu, sous cette lumière, à cet appareillage. Elles l’ont donc bien perçu. Leur réponse fut d’ailleurs quelque peu supérieure à celle obtenue en lumière visible (nombres moyens d’ouvrières ayant répondu au cours de deux tests réalisés chaque fois lors de deux expériences : en UV : 3,62 ; en lumière visible : 2,79). Ceci résulte d’une locomotion plus lente et davantage directionnelle en lumière ultraviolette (orientation des ouvrières vers l’appareillage : en UV : 46,3 degrés angulaires ; en lumière visible : 58,5 degrés angulaires ; vitesse linéaire des ouvrières : en UV : 8,8 mm/sec ; en lumière visible : 12,0 mm/sec). Conclusion Le présent travail montre que les ouvrières de M. sabuleti distinguent l’un de l’autre des éléments différemment colorés, et voient aussi en éclairage ultraviolet uniquement. Il est possible que leur vision de la perspective (fait révélé par Cammaerts, 2004) résulte de leur sensibilité d’une part à la lumière visible (pour nous) et d’autre part à la lumière ultraviolette. La sensibilité des ouvrières de M. sabuleti aux différentes longueurs d’onde varie en fonction de l’intensité de la lumière. Une certaine adaptation concernant la sensibilité aux longueurs d’onde pourrait donc se produire en fonction de changements d’intensité lumineuse, tout comme une adaptation de la sensibilité à la lumière (visible) se réalise suite à un changement d’intensité lumineuse (Cammaerts, 2005). De telles adaptations ont été mises en évidence chez Formica polyctena par Menzel & Knaut (1973). Nous tentons actuellement de préciser les seuils chromatiques et achromatiques des ouvrières de M. sabuleti sous deux intensités lumineuses différentes : nous pouvons d’ores et déjà affirmer que ces seuils dépendent des longueurs d’onde présentées. On admet communément que les fourmis ne sont guère sensibles au rouge. Mais Depickère et al. (2004) ont montré que lorsque des ouvrières de Lasius niger passent de l’obscurité à un éclairement rouge, leur comportement agrégatif change. Le présent travail montre que les M. sabuleti voient le rouge sous haute intensité lumineuse, mais non sous faible intensité. Nos déterminations (en cours) des seuils chromatiques et achromatiques semblent révéler qu’après être restées dans l’obscurité durant quelques jours, les M. sabuleti sont plus sensibles aux diverses longueurs d’onde, celles correspondant au rouge y compris. Nous pourrons donc sans doute rendre compte des contradictions entre divers auteurs à propos de la vision du rouge par les fourmis. Le travail publié le plus semblable à celui que nous présentons ici est celui réalisé par Kretz (1979) sur la fourmi « à grands yeux » Cataglyphis bicolor, l’auteur procédant comme nous par conditionnement opérant différentiel. Au terme de son travail, Kretz (1979) présente un « colour diagram » très semblable à celui que nous allions proposer pour M. sabuleti, comprenant, comme nous l’avions imaginé, une couleur « ant-purple » que nous ne voyons pas. Remerciements Nous tenons à remercier très sincèrement Mr le Prof. Louis De Vos et MM Claude Bourtembourg et Roger Cammaerts qui nous ont très efficacement épaulées durant toute la réalisation du présent travail. Références Autrum H. (1981) Comparative Physiology and Evolution of Vision in Invertebrates. C : Invertebrate Visual Centres and Behavior II, Handbook of Sensory Physiology, Vol VII/6B, Springer-Verlag, Berlin, pp. 2-91. Cammaerts M.-C. (2004) Some characteristics of the visual perception of the ant Myrmica sabuleti, Physiol. Entomol. 29, 472-482. Cammaerts M.-C. (2005) Sensitivity and adaptation of Myrmica sabuleti workers (Hymenoptera : Formicidae) to light, Myrmecologishe Nachrichten 7, 77-86. Cammaertsd-Tricot M.-C. (1973) Phéromones agrégeant les ouvrières de Myrmica rubra, J. Insect Physiol. 19, 1299-1315. Depickère S., Fresneau D., Deneubourg J.-L. (2004) The influence of red light on the aggregation of two castes of the ant, Lasius niger, J. Insect Physiol. 50, 620-635. Kretz R. (1979) A behavioral analysis of colour vision in the ant Cataglyphis bicolor (Formicidae, Hymenoptera), J. Comp. Physiol. 131, 217-233. Menzel R., Knaut R. (1973) Pigment movement during light and chromatic adaptation in the retina cells of Formica polyctena (Hymenoptera, Formicidae), J. Comp. Physiol. 86, 125-138. -------------------- |
|
|
Version bas débit |