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Acideformik.com _ Fiches descriptives des espèces envahissantes _ Paratrechina longicornis (Latreille)

Ecrit par : Hydraméthylnon Friday 09 May 2008 à 06:03

Paratrechina longicornis (Latreille)


Présentation :

Paratrechina longicornis, ou Fourmi Folle Noire ou FFN (par opposition avec la http://www.acideformik.com/forums/index.php?showtopic=7517), possède une biologie offensive très mal connue.

Son nom scientifique lui vient de la longueur de ses antennes, presque aussi longues que son corps.
Son nom commun lui vient de sa façon frénétique de se déplacer dans tous les sens et de sa couleur.

Originaire d'Afrique ou d'Asie (elle était trop mal connue pour pouvoir en situer l'origine avec certitude à présent), elle est devenue un major des pestes mondiales, une radioactivité biologique de plus. Elle est considérée aujourd'hui comme une des huit fourmis les plus dangereuses à l'échelle mondiale.

Elle est classée comme peste à deux titres. D'une part elle est un Attila biologique accompli, faisant le vide de tout ce qui ne lui est pas utile dans son domaine, d'autre part, et à l'instar d'autres super-envahissantes, elle élève en masse les aphidiens (pucerons et cochenilles) pour en traire les miellats sucrés et protéïnés, au détriment des plantes hôtes, donc des cultures humaines.


Caractéristiques générales :

Elle fait partie des 8 espèces de fourmis classées Super-envahissantes.
Pour faire partie de ce club très fermé il faut posséder les caractéristiques suivantes :

Elle n'est pas agressive mais possède un venin efficace qui lui permet de nettoyer presque totalement ses "propriétés".
Elle s'invite, elle aussi, assez facilement dans les maisons et immeubles.
Elle est rangée en haut du top 100 des pires pestes mondiales.

Classification :
  1. Règne : Animalia
  2. Embranchement : Arthropodes
  3. Sous-embr. : Hexapodes
  4. Classe : Insectes
  5. Sous-classe : Pterygotes
  6. Infraclasse : Neoptères
  7. Ordre : Hymenoptères
  8. Sous-ordre : Apocrita
  9. Infra-Ordre : Aculeata
  10. Super-Famille : Vespoidea
  11. Famille : Formicidae
  12. Sous-famille : Formicinae
  13. Genre : Paratrechina
  14. Espèce : Paratrechina longicornis (Latreille, 1802)
Synonymes :

Formica longicornis Latreille (1802)
Prenolepis longicornis Roger (1863)
Prenolepis (Nylanderia) longicornis Emery (1910)
Formica vagans Jerdon (1851)
Formica gracilescens Nylander (1856)
Tapinoma gracilescens F. Smith (1858)
Paratrechina currens Motschoulsky (1863)

Morphologie :

C'est une assez grande fourmi :

- http://antweb.org/getComparison.do?rank=species&genus=paratrechina&name=longicornis&project= : monomorphes (pas de majors), de 2,3 à 3 mm environ, unicolores noires, tirant parfois sur le brun foncé avec des nuances de bleu-noir irisées. Leur espérance de vie est apparemment inconnue.
- gynes : Je n'en ai pas trouvé de photo correcte sur le net. 6 à 7 mm (sans les ailes), même coloration que les ouvrières. Son espérance de vie est inconnue aussi mais porterait sur plus d'une année au moins.
Je vous donne une vue de cette reine par agrandissement de cette http://academic.evergreen.edu/projects/ants/genera/paratrechina/species/longicornis/images/Slide0098_o.JPG : [attachment=2687:gyneFFN.jpg]
Anatomie de l'ouvrière :


Critères d'identification post mortem :

1. La couleur et la taille 2-3 mm
2. La formule antennaire (12 segments sans massue)
3. La longueur des antennes et du scape (> 2 fois la longueur de la tête)
4. La forme ovoïde de la tête
5. Pas d'épines propodéales

Photos anatomiques (et autres, en anglais) : http://www.padil.gov.au/viewPestDiagnosticImages.aspx?id=186

Habitat :

Elle ne fait pas de fourmillière mais des nids qu'elle installe un peu partout.

Elles colonisent tous les milieux, y compris les maisons, avec une préférence pour les endroits sombres et humides : murs, faux-plafond, fondations, compteurs, cagibis, etc.

Elles ont l'habitude d'aller chercher leur nourriture loin de leur nid.

Reproduction :

Comme toutes les super-envahissantes, elles sont polygynes.

Un nid compte une vingtaine de reines et au moins cent fois plus d'ouvrières.

La reproduction extranidale, par vol nuptial, n'a jamais été constatée, la reproduction intranidale semble être la seule bien que les sexués soient tous ailés au départ.

Il semble que la production des sexués soit stimulée par l'arrivée de la fraîcheur.

Le nombre d'ouvrières est relativement saisonnier, présente des pics au début des saisons d'abondance.

Ethologie :

Expansion naturelle :
Elle suit le standard des super-envahissantes, les nids bourgeonnent autour de celui d'origine. La vitesse de leur extension n'est pas établie avec précision mais elle semble être rapide.

Structure sociale :
Comme toujours chez les super-envahissantes, il n'y a pas de hiérarchie sociale, juste la séparation ouvrières-gynes, toute information utile diffuse rapidement dans la colonie.

Alimentation :
C'est avant tout un généraliste omnivore, prédateur à l'occasion mais qui, comme beaucoup d'envahissantes, fait de l'élevage de pucerons et cochenilles. Le miellat de ces aphidiens peut représenter plus de la moitié de leur alimentation. La présence surchargée de cochenilles et de pucerons sur les plantes à feuilles lisses est un critère de dépistage fiable des espèces envahissantes.

Leur préférence est nettement marquée pour les glucides. Il semble que leur appétence pour les protéines soit saisonnière, pendant la maturation des grosses pontes.

Comme pour les autres super-envahissantes, leur pouvoir de mobilisation sur toute nouvelle ressource est très grand et très rapide. J'ai constaté la mobilisation de plus d'une centaine d'individus sur un appât en moins de 2 minutes.

Une particularité curieuse : Elles n'ont pas d'aiguillon mais leur glande à venin fonctionne. Le venin est sans doute introduit dans les blessures faites avec les mandibules, en s'arc-boutant dessus pendant l'attaque.

Compétition interspécifique :
Leur agressivité est grande, la force de leur venin aussi mais elles ne s'en servent pas aussi brutalement que les fourmis de feu, par exemple.

Elles montrent une certaine tolérance aux autres espèces de fourmis, au moins dans ces premières années d'installation. Ensuite, je ne sais pas si c'est par la compétition sur les ressources mais les autres espèces se font plus rares.

Diapause :
Elles n'en connaissent aucune.

Impact :
Habituels des super-envahissantes : Le nettoyage de la biodiversité par le vide sauf pour les espèces qu'elles élèvent ou qu'elles ne peuvent atteindre (faune hypogée, espèces cuirassées et trop petites pour elles).


Répartition mondiale détaillée et autres :

http://pick4.pick.uga.edu/mp/20m?kind=Paratrechina+longicornis

Son explosion mondiale est due à l'homme : Comme pour toutes les envahissantes, La dissémination par l'homme est extrêmement facile et pratiquement invisible lorsqu'on n'est pas averti et très attentif. De plus, n'étant pas directement agressive elle n'est pas particulièrement surveillée/détectée.

Les recherches en lutte biologique sont nulles.

La seule méthode connue et employée, est la lutte chimique à base d'IGRs (= inhibiteurs de croisssance : méthoprène et pyriproxyfène) et surtout d'insecticides systémiques (= à effet retardé, que les ouvrières apportent aux reines : hydramethylnon (encore lui ! ph34r.gif )

Voir aussi :
(NB: Le nombre de publications francophones sur cette fourmi est quasiment nul !)

http://www.fenua-animalia.org/FA/pff/img/indexA/carto/PAPP-fr.pdf
http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=17258698 (résumé en français)


http://antweb.org/getComparison.do?rank=species&genus=paratrechina&name=longicornis&project= (En anglais)
http://www.issg.org/database/species/ecology.asp?fr=1&si=958&sts= (En anglais)
http://www.landcareresearch.co.nz/research/biocons/invertebrates/Ants/invasive_ants/parlon_info.asp (En anglais)
http://www.padil.gov.au/viewPestDiagnosticImages.aspx?id=186 (En anglais)
http://creatures.ifas.ufl.edu/urban/ants/crazy_ant.htm (En anglais)
http://www.biosecurity.govt.nz/files/pests/invasive-ants/crazy-ants/crazy-ants-risk-assessment.pdf (En anglais)
etc ...

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mise à jour au 10/05/2008.
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Des remarques ?
Des questions ?

Ecrit par : Was.Auro Friday 09 May 2008 à 20:38

Super Eric,
Tu t'améliores de fiches en fiches !!
J'espère que je serai aussi bon pour celle que tu m'as demandé de faire !

Deux remarques :
- pour les photos de reines, j'ai une vingtaine de spécimen dans de l'alcool (souvenir d'échecs cuisants de tentative d'élevage...) si tu veux t'exercer un peu à la macro.
- deuxième remarque : L'AMDRO efficace pour la lutte contre ces fourmis, j'ai quelques doutes et j'étaye mes dires par l'article suivant http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17461077 :

Stanley MC, Robinson WA.

Landcare Research, Private Bag 92170, Auckland, New Zealand.

Exotic ant incursions are becoming more frequent around the globe, and management with toxic baits is a suitable strategy for most species. Crazy ants, (Latreille) (Hymenoptera: Formicidae), however, are notoriously difficult to attract to commercial baits, which are generally tailored to the preferences of fire ants. We tested P. longicornis preferences for various food types and commercial ant baits. Baits trialed were commercially available products Amdro, Maxforce, Xstinguish (nontoxic monitoring version), Presto, and tuna (in spring water), sugar water (25%), boric acid (1% in 25% sugar water), and deionized water. Tuna and Xstinguish, along with sugar water and sugar water + boric acid, were the most attractive baits to P. longicornis foragers. The granular baits (Maxforce, Amdro, and Presto) were not as attractive to P. longicornis foragers. A decrease in temperature from summer (30 degrees C) to autumn (23 degrees C) trials did not seem to affect the food preferences of P. longicornis. Although P. longicornis recruitment was substantially lower during trials where there was concurrent high native ant abundance and diversity, P. longicornis still recruited to preferred baits in numbers higher than any other species. Given that tuna is impractical for management programs, the effectiveness of boric acid, sweet liquid baits in eliminating P. longicornis colonies should be compared with that of the toxic version of Xstinguish. If both are effective at eliminating colonies, we recommend sweet liquid baits containing boric acid be used for small-scale incursions (one or two nests), but a more practicable solid bait, such as Xstinguish, be used for larger scale incursions (numerous nests).

Je suis plutôt d'accord avec eux, j'ai pu constater que le beurre de cacahuètes les attire très peu donc de même pour l'AMDRO.

Ecrit par : Hydraméthylnon Friday 09 May 2008 à 21:52

Merci pour la fiche, j'aime bien apprendre wink.gif

Sinon, ce que j'ai trouvé parle d'hydraméthylnon, pas d'Amdro. (J'ai pas le lien ici, je ne suis pas sur mon ordi) L'amdro est un mélange d'huile d'arachide (= de cacahuètes) avec la molécule sur un support en brisures de maïs, si j'ai bien lu, donc des lipides. L'Amdro n'est donc pas adapté contre les fourmis préférant les glucides, comme celle-ci, pas plus que MaxForce, Presto et autres Xtinguish. (ce dernier contenant un peu de fipronil si mon Alzeimer ne me trompe pas)

Comme le dit Stanley Robinson, les versions commercialisées à base d'hydraméthylnon sont surtout conçues contre les fourmis de feu qui préfèrent les lipides, on sait ça.

La solution à l'acide borique est efficace mais pas autant et ne marche pas pareil :
L'acide borique est un IGR (inhibiteur de croissance) pas cher du tout mais acide (...)
L'hydramethylnon (qui est très cher) est un systémique bloquant le métabolisme énergétique des mitochondries, donc à effet "immédiat retardé" (2 à 3 jours pour finir son boulot).
Un IGR ne te nettoie que la génération montante en bloquant les mues, un systémique te nettoie la génération en cours et la montante (mais moins efficacement qu'un IGR pour la montante, c'est pour ça qu'il ne faut jamais les utiliser ensemble : ils s'opposent, comme les insecticides de contact et les systémiques.)

Les IGR, contact et systémiques préconisés ont une rémanence très courte dans l'environnement, le pire de tous est le fipronil (contact) dont il ne reste rien au bout de 120 jours (4 mois) en climat tempéré (donc +/- 2 mois en tropical humide), les autres ont disparu entre une et deux semaines, l'hydraméthylnon en 3-4 jours, souvent moins.

L'hydraméthylnon reste donc une solution pas trop sale et efficace contre pas mal de bestioles, tout est dans la préparation d'un appat le plus spécifique possible. En zones hautement contaminées la question de l'appât spécifique devient un peu annexe car les fourmis ont fait le vide avant qu'on ne réagisse (si on réagit ...)

Le hic, pour mélanger du sucre avec de l'hydraméthylnon est que ce dernier se désintègre au contact de l'eau (et aux UV solaires), comme tu le sais, et que les sucres attirent l'eau même de l'air (dessicants).
Je pense qu'il faudrait chercher un moyen de contourner ça et ça ne doit pas être si difficile à faire (pectines ?) mais le marché est encore trop faible pour que les industries chimiques s'en préoccupent vraiment (c'est d'ailleurs, comme tu le sais aussi, la même raison qui fait qu'il n'existe toujours pas de version d'Amdro à granulométrie adaptée à la PFF)

Bref, j'ai écrit une connerie qui n'en est pas totalement une.
wink.gif

Ok pour la macro, en plus il faut qu'on se voie de toute façon : RFO me cours après et veut "du terrain" à montrer aux caméras.
++

Ecrit par : Amblyopone pallipes Thursday 03 July 2008 à 21:33

Un nouvel article sur la repartition/biologie de Paratrechina longicornis par James Wetterer est disponible dans Myrmecological news de cette année.
Personnellement, je ne pensais pas que sa répartition était si importante.
Enfin, Wetterer propose un nouveau nom commun pour cette espèce: "longhorn crazy ant" que l'on pourrait traduire fourmi folle à longues antennes. Il explique le choix de ce nom dans l'article.


L'article est disponible ici:
http://www.myrmecologicalnews.org/cms/images/pdf/online_earlier/mn11_137-149_non-printable.pdf

Ecrit par : Hydraméthylnon Saturday 05 July 2008 à 13:13

Merci Benoit,

J'y ai noté deux choses, entre autres : Elle est en Polynésie depuis au moins 1907 et son seul rival à l'échelle mondiale, au point de vue pouvoir de dispersion est Monomorium pharaonis (fiche à faire) qui est aussi en Polynésie depuis un bail.

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