Le pragmatisme sexuel de la reine mère


Entre deux modes de reproduction, réputés pour avoir chacun leurs avantages et leurs inconvénients, la fourmi Cataglyphis cursor n’a pas voulu choisir.
Résultat : la reine opte pour la reproduction asexuée quand il s’agit d’engendrer ses héritières et pour la reproduction sexuée quand il est seulement question d’ouvrières.
Un système original décrit aujourd’hui dans la revue Science par des chercheurs belges, français et suisse.

La reine donne naissance à des filles héritières de la couronne grâce à une forme de parthénogenèse qui permet de fusionner deux œufs.

Ce qui signifie que la mère transmet deux copies de son patrimoine génétique et assure ainsi la perpétuation de ses gènes.
L’inconvénient de cette reproduction sans fécondation par un mâle est une moindre variété génétique des individus qui peut à terme les fragiliser.

Cependant, la reine vivant dans un cocon bien protégé, le problème se pose peu, suggèrent Morgan Pearcy, de l’Université libre de Bruxelles, et ses collègues.

Les ouvrières, elles, sont en première ligne, exposées à des environnements changeants et à divers agresseurs.
D’où l’intérêt de la reproduction sexuée que la reine des Cataglyphis cursor utilise alors.
La diversité génétique des fourmis ouvrières facilite aussi la répartition du travail.

Les reines de ces fourmis, observées dans le sud de la France, sont-elles les seules à recourir aux deux modes de reproduction ? Ce comportement a-t-il pu être provoqué par l’observation en laboratoire ?
Nul doute que cette étude va conduire nombre d’éthologues à regarder de plus près la reproduction des reines dans les fourmilières.

Cécile Dumas (03/12/04)
Le Nouvel Observateur / Archives / Jeudi 2 Décembre 2004