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> Résister !, Méthodes de lutte pas trop sales
Hydraméthylnon
* Sunday 22 June 2008 à 11:50
Message #1


Major Fatal


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Vu que la question est récurrente et génère des hors-sujets chaque fois qu'elle est évoquée je la pose ici pour centraliser, ça sera plus facile de répondre/rediriger ici par la suite :

Comment lutter contre une espèce de fourmi
classée envahissante ou super-envahissante ?


Préliminaire indispensable :

Tous les êtres vivants sont limités dans leur expansion par des facteurs tels que le climat (température, humidité, ...), leurs parasites, leurs prédateurs et leurs pathogènes.
Une espèce transplantée hors de son milieu d'origine n'emporte avec elle que quelques pathogènes tout au plus et encore moins de parasites : Elle s'installe forcément dans un paradis pour elle.
Comme la biologie intime de ces espèces est très mal connue la plupart du temps, leurs facteurs limitants biologiques (les trois "P" ci-dessus) le sont encore moins, souvent pas du tout. Il en découle que les seules méthodes de lutte efficaces connues actuellement sont chimiques dans la plupart des cas. La lutte biologique est un cas d'exception, qui plus est au minimum aussi dangereux que la chimie, en général plus. sad.gif

Il existe, en gros, deux classes de pesticides : Les rémanents et les "volatiles", labiles.
En général, ils sont tous plus ou moins dangereux, cancérigènes, toxiques, physiologiquement agressifs sur l'homme.
  • Les pesticides rémanents sont de plus en plus proscrits, en particulier lorsqu'utilisés à grande échelle. On connaît tous les ravages de certains défoliants (dioxine) et des organo-chlorés (DDT, etc.).
  • Les pesticides non-rémanents se désintègrent rapidement mais restent souvent très dangereux à haute dose (quand je dis "souvent" c'est un euphémisme : Ils le sont tous, rémanents ou pas.)
Chacune de ces deux classes peut se subdiviser en pesticides à large spectres (non sélectifs) et à spectres étroits (visant une seule catégorie d'espèces, en général en fonction de leurs préférences alimentaires) Pour être lucide, il faut bien se dire que la spécificité d'une molécule chimique est très théorique : Un inhibiteur mitochondrial, par exemple, ou un neurotoxique ne fait pas de différence entre les espèces, tout est dans le choix de l'appât qui le contient.

La lutte chimique "intelligente" cherche donc de plus en plus à utiliser des pesticides non-rémanents à spectre étroit. Il s'agit, en général mais pas toujours, de molécules et de produits récents, donc "pas donnés".

En ce qui concerne les fourmis, au niveau du choix de l'appât, ça joue en général sur la préférence alimentaire pour les lipides/glucides/protides. La conséquence est que tout ce qui a la préférence pour le support choisi se fait intoxiquer : L'Amdro marche aussi bien contre Solenopsis invicta, Wasmannia auropunctata, Anoplolepis gracilipes, que contre toute espèce ayant une appétence marquée pour les lipides, fourmi ou pas. Les état d'âme quant à son emploi à grande échelle contre ces espèces sont rares parce que les effets de celles-ci sur l'écosystème sont bien plus drastiques que ceux du produit : Elles détruisent bien moins sélectivement tout ce qu'elles croisent.

De plus, chaque classe peut aussi se subdiviser selon le mode d'attaque :
  • insecticides de contact, tuant tout ce qui le touche
  • insecticides systémiques, mettant plusieurs heures pour agir, permettant d'atteindre les reproductrices
Ces deux façon d'opérer sont antagonistes, à ne jamais utiliser en même temps, sinon la deuxième ne sert à rien ...

Comme ce serait trop simple ainsi, il faut également distinguer le type d'attaque :
  • Les toxiques : Action immédiate sur la génération en cours
  • Les inhibiteurs de croissance (les IGR) : Action sur la génération montante
Leur emploi simultanné est aussi absurde que précédemment, pour des raisons identiques.

Par ailleurs, il faut bien garder en tête la caractéristique, essentielle ici, commune à toutes les super-envahissantes : Elles sont polygynes. En d'autres termes, la jonction de deux colonies ne génère aucun affrontement mais se traduit par une fusion immédiate. Le corrolaire est qu'une éradication n'est réussie qu'avec la destruction de la dernière reine => La lutte commence obligatoirement par un établissement précis des frontières des contaminations, frontières à tenir le plus à jour possible. Comme le nombre de gynes au mètre cube peut se révéler faramineux, lorsque la colonie se compte en hectares ou en kilomètres carrés c'est extrêmement difficile, en général totalement impossible. Si on y ajoute la suveillance des essaimages pour les espèces se reproduisant par vol nuptial (la majorité des super-envahissantes pratique surtout la reproduction intranidale, sans vol nuptial ou de façon marginale), on comprend la force de l'adversaire, le caractère désespéré de la lutte. (cf. Solenopsis invicta)

Cerise sur le gateau, les pesticides non rémanents sont, comme leur nom le laisse deviner, très fragiles : Ils sont détruits par les ultra-violets du soleil et par l'eau (de pluie).

Il est donc indispensable de bien réfléchir avant d'agir (je sais, c'est chiant, c'est pas instinctif, mais c'est comme ça)

Méthodes :

Je ne parlerai que des non-rémanents, les autres étant proscrits à présent (même si toujours en vente...).
Dans tous les cas il est parfaitement illusoire d'espérer une éradication en un seul traitement :
Contre de pareilles pestes, aucune méthode au monde n'a un rendement égal à 100% dès le premier coup.

Sur des colonies de petite surface (moins d'un hectare en général), on peut tenter le coup avec une seule classe de produit, voire alterner les produits à quelques mois d'écart.

Sur les autres, c'est plus compliqué (préconisation ISSG 2007) :
  1. Traiter la périphérie des contaminations avec un insecticide de contact, c'est à dire tuant les ouvrières presque sur place, sur une largeur de 50m vers l'intérieur de la frontière connue et 25m à l'extérieur. Si le diamètre de l'infestation ne fait pas 75m, tout traiter comme ça.
  2. En même temps, traiter le reste de la surface contaminée avec un IGR (Insect Growth Regulator = Inhibiteur de croissance des insectes) : Tuer la génération en préparation.
  3. Un mois plus tard, traiter tout avec un insecticide systémique : Tuer les gynes
  4. un à deux mois après, tester toute la surface anciennement contaminée pour détecter les poches de résistance (les zones humides et/ou abruptes en général). En cas de détection positive, reprendre en "1" sur le spot.
  5. Tester 2 ans toute la zone contaminée en n'ayant que des tests négatifs pendant 2 ans avant de déclarer l'éradication teminée (et en croisant les doigts pour que ce soit bien le cas ...)
Inutile de dire que deux ans c'est déjà bien long et quasiment toujours insuffisant.

En insecticide de contact, on utilise souvent le Fipronil : Il tue les abeilles, oui, mais il n'y en a plus en zone "rouge", la fourmi les tue avant nous. Il a une rémanence de 120 jours environ. Quand les infestations sont juste naissantes (quelques dizaines de m²), on y va carrément au propoxur (Baygon "industriel") : C'est bien plus rémanent, toxique, moins sélectif mais sur de petite surfaces c'est mieux que la fourmi et sa rémanence n'est pas éternelle (il y a bien pire).

En IGR, c'est très cher et fragile, pyriproxyfène et méthoprène surtout (il y en a d'autres). Prendre la plus efficace des deux et si ça s'avère pareil alors la moins polluante (directement ou par ses produits de dégradation) préférentiellement au moins cher. On emploie aussi parfois l'acide borique qui est bien plus ancien, bien moins cher et très efficace mais il n'est pas conditionné pour une utilisation extensive ciblée (appâts conçus exprès) contrairement aux précédents.

En systémique, on a le choix entre l'hydraméthylnon. Donc c'est l'hydraméthylnon. Il y a bien des cyfluxines et autres perméthrines mais sur de très grandes surfaces on prend forcément le moins dangereux, le moins rémanent, ... et le plus spécifique. En plus l'hydraméthylnon est plus efficace, on l'a testé ici.

Bon, tout ça c'est pour les luttes d'envergure surtout.

Au niveau des particuliers, face à une super-envahissante, le mieux est de s'adresser tout de suite à un professionnel de la désinsectisation, agréé contre elles par le ministère de l'Agriculture (si on ne veut pas payer un charlatan), qui est formé pour ce genre de choses, surveillé, et qui, outre l'obligation de résultat que vous n'aurez pas en achetant des produits à passer vous-mêmes, en dispose à des concentrations interdites à la vente au grand public (puisqu'il a été formé à les utiliser en toute sécurité pour lui et pour vous), souvent 20 fois plus (=> ça revient moins cher à tout le monde) et avec, pour les répandre, un savoir-faire et des outils que vous n'avez pas.

De plus, si vous avez bien compris le danger caché derrière le mot "polygyne", il vous faut essayer de faire traiter en même temps que tous vos voisins : Plus la zone traitée sera grande, plus longs en seront les effets. Pour ceux habitant en collectivité (immeubles, résidences) il faut tout faire pour que les traitements soient les plus collectifs possible : Ça coûte bien moins cher à chacun comme ça et c'est bien plus efficace en plus.

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C'est fou de préserver la biodiversité en étant obligé de balancer des saloperies chimiques dans la nature !
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